Skip to main content

ActionAid Haïti offre aux jeunes des milieux ruraux de meilleures perspectives

Nosler, l'un des jeunes qui participent dans le programme de formations professionnelles

D’après une étude publiée conjointement par l’UNESCO et le Ministère de l’éducation et de la formation professionnelle en 2017, seuls 46% des enfants en âge d'aller à l'école secondaire fréquentent les classes secondaires en Haïti. Des opportunités de formation technique sont limitées et peu accessibles, notamment dans les zones rurales pour leur donner des orientations vers le développement socioéconomique. L'offre de formation professionnelle à travers le pays comptait environ 20 000 élèves pour toutes les filières, et était prise en charge à 90% par le secteur privé, selon une étude publiée en 2017. Par conséquent, les jeunes de familles à faibles moyens dans les milieux ruraux, s’adonnent avec difficulté à de petits boulots, font de petits commerces ou émigrent dans les villes urbaines avec les conséquences que cela entraine.

A Juanarya, commune d’intervention d’ActionAid Haiti dans le département du Centre, beaucoup de jeunes qui ne peuvent plus poursuivre une éducation formelle deviennent des commerçants informels, vendant des marchandises sur les marchés locaux ou finissent par migrer vers les villes ou vers la République Dominicaine, souvent au péril de leur vie. Sur la frontière et en la République Dominicaine, beaucoup de jeunes sont piégés sur les sites de construction ou les champs, percevant un maigre salaire et en proie à des traitements inhumains. La pyramide des âges des migrants reflète le profil d'une population jeune, 42,1% ont moins de 25 ans. Sur cette route de migration, les filles sont particulièrement les plus vulnérables ; les cas de grossesse précoce, de viol et de violence basée sur le genre (VBG) deviennent innombrables.

Nosler, l'un des jeunes qui participent dans le programme de formations professionnelles
Nosler, l'un des jeunes qui participent dans le programme de formations professionnelles
ActionAid Haiti

Cela souligne la nécessité de mettre en œuvre des stratégies visant à créer des opportunités de formation pour des jeunes, aboutissant à un emploi décent. ActionAid Haïti finance des programmes de formation professionnelle sanctionnés par un diplôme, adressés à des jeunes de 15 à 25 ans des communes de Juampas et Juanaria. A Hinche, le Mouvement Paysan Papaye assure la gestion du programme en ciblant des jeunes des communautés de Juanarya en fonction de leur capacité et leur centre d’intérêt. Le programme a jusqu’ici offert des cours à 150 jeunes en informatique, carrelage, électricité, plomberie, cuisine et pâtisserie, couture entre autres. Les participants au programme sont des enfants qui ont abandonné le système éducatif, des sur-âgés et des écoliers. Les horaires de cours sont conçus pour tous les accommoder. Les écoliers parviennent à suivre des formations pendant les week-ends et les vacances scolaires. Ceux qui sont inscrits à des options qui nécessitent des séances de pratique ont des horaires spéciaux. C'est le cas de Nosler qui suit une formation en carrelage. « Je vis à Juanarya, une petite localité dans le département du Centre. J'ai 20 ans. Je suis en dernière année pour terminer l'école secondaire. Je vais à l'école le matin et je suis des cours de formation professionnelle pendant les week-ends. Je vais aussi aux séances de pratique sur des chantiers de construction après l'école, ce qui est difficile, mais je fais des sacrifices pour poursuivre mon rêve de devenir carreleur professionnel », a-t-il fait savoir.

Les maigres moyens des parents de Nosler ne sont pas suffisants pour combler les besoins de la famille. Une situation qui avait fait naître dans l’esprit du jeune homme l'idée de migrer dans le pays voisin. « La récolte de nos cultures est vendue sur le marché et ce qui reste suffit à peine pour la famille. Pour aider mes parents, j'étais prêt à abandonner l'école et à partir en République Dominicaine pour trouver du travail. Je savais que ce serait une décision dangereuse car j'avais entendu beaucoup de mauvaises nouvelles venant de là-bas. J’avais donc accueilli avec joie mon intégration dans le cours professionnel. Lorsque j'ai commencé le cours en janvier 2021, j'ai reçu un kit d'outils comprenant un mètre à ruban, un niveau à bulle et une truelle pour les séances d'entraînement. J'en suis maintenant à ma troisième séance d'entraînement. J'ai beaucoup appris depuis», nous a-t-il confié. Dans un futur très proche, il pourra commencer à gagner sa vie, loin du danger, et aider ses parents.

Nosler en plein travail
Nosler en plein travail
ActionAid Haiti

Les jeunes hommes en âge de travailler sont très vulnérables. Ils quittent souvent leur communauté pour aller se débrouiller dans les grandes villes ou migrer vers la République Dominicaine ou plus loin. En traversant la frontière, ils subissent les pires atrocités : vol, trafic d'êtres humains, etc. En leur offrant des opportunités dans leurs communautés, ils sont épargnés de nombreux dangers et peuvent espérer une autonomie économique. Grâce au programme de formation professionnelle financée par ActionAid Haïti, ils peuvent avoir de nouvelles perspectives. « Je voulais être carreleur depuis que j'ai vu en ville quelqu'un poser des céramiques sur la façade d’une grande maison. C'était impressionnant de voir le mur décoratif avec des motifs magnifiques et colorés. J'ai appris que les personnes qui posent les céramiques sont bien payées. Lorsque j'ai été sélectionné pour participer au programme, j'étais ravi car j'étais sur le point d'abandonner l'école; mes parents étaient très endettés et ne pouvaient plus assurer l’écolage » avoue Nosler.

86 des 150 jeunes ont déjà terminé leur programme de formation. Environ 20 d'entre eux ont créé leur propre entreprise de carrelage, de cuisine et de création de vêtements. Et 20 ont travaillé comme stagiaires dans des entreprises de la région. « Ce n'est pas un travail facile, car il est physiquement exigeant; vous devez soulever des matériaux lourds comme des sacs de ciment et le mélange du ciment requiert de la force et des techniques. Je me souviens que lorsque j'ai commencé à poser les carreaux et que je ne le faisais pas de la bonne manière, les ouvriers se moquaient de moi. Maintenant, je prends des mesures et je pose les carreaux correctement. Je suis très fier de moi.  Avec cette formation, je vois un bel avenir pour moi. J'ai l'intention de chercher du travail une fois que j'aurai terminé mes examens. Ainsi, je pourrai payer les frais de ma scolarité pour l'année prochaine. Je sais que ce sera un soulagement pour mes parents. Nous sommes six frères et sœurs dans la famille, nous vivons tous avec nos grands-parents et d'autres parents, la prise en charge était trop lourde pour eux », s’est-il réjoui.

Nosler durant une seance prattique.
Nosler durant une seance pratique.
ActionAid Haiti

Les groupes de discussion ont révélé que les jeunes participants au programme sont désormais moins enclins à migrer vers la République dominicaine ou les villes voisines. Dans un pays où les jeunes âgés de 10 à 24 ans représentent environ 42% de la population, la migration est malheureusement une préoccupation majeure car la majorité de la population pense à quitter le pays en dépit du mauvais traitement infligé aux migrants haïtiens. Ce programme de formation professionnelle pour les jeunes dans les milieux ruraux rentre dans le cadre d’une campagne de sensibilisation, prônée par ActionAid Haïti et ses Partenaires pour assurer la participation des jeunes au développement de leur communauté tout en garantissant leur épanouissement. Le cas de Nosler renforce cet élan, « j’ai hâte d'obtenir mon diplôme et d'être officiellement un carreleur », a ajouté Nosler avec assurance.