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La contribution d’ASARANGA dans la relance économique des femmes de la commune des Roseaux dans la Grand’Anse

Fanette, jeune maman et commerçante

Après le passage de l’Ouragan Matthieu sur le grand sud d’Haïti en octobre 2016, le département de la Grand’Anse, considéré comme le grenier du pays, a été terriblement touché. Les récoltes ont été complètement détruites et plusieurs centaines de bétails emportés, laissant une grande désolation pour les communautés locales déjà très affectées par des crises socio-politiques et économiques récurrentes. En 2018, pour répondre aux besoins urgents de la population et l’aider à se reconstruire, ActionAid Haïti et des partenaires comme CARE et Konbit Peyizan Grandans (KPGA) avaient lancé le projet d’Appui à la Sécurité Alimentaire, au Renforcement Agricole et à l’Amélioration Nutritionnelle dans la Grand’Anse (ASARANGA), financé par l’Union Européenne.

Le projet ASARANGA a été articulé autour de quatre grandes composantes tout en introduisant une approche multisectorielle pour répondre aux dommages causés par le terrible ouragan Matthieu. Avec des dégâts matériels estimés à plusieurs millions de dollars américains, le bilan était lourd pour une population qui faisait déjà face à de sérieux problèmes socio-économiques. Bénitha, Fannette et Erèse sont parmi les 1 157 personnes qui ont constitué 40 groupes de mutuelle de solidarité incluant 839 femmes et 318 hommes au niveau de la Commune des Roseaux pour promouvoir l’inclusion financière d’une couche vulnérable et marginalisée par les services financiers formels. Nous partageons ici leur expérience dans le projet.


Bénitha, une artisane incontournable dans la production de cassave


Dans la localité de Fond Bayard, une petite localité dans la commune des Roseaux, vit
Bénitha, mère de trois enfants et productrice de cassave, un produit local à base de manioc
très apprécié en Haïti. ActionAid Haïti l’a rencontrée au cours d’une visite de suivi où elle a
partagé son récit qui mérite beaucoup de considération. Avant de recevoir une subvention
pour remettre sur pied son commerce de cassave qui déclinait, Bénitha arrivait à peine joindre
les deux bouts pour nourrir sa famille et répondre à leurs besoins quotidiens. La situation
devenait insoutenable. A chaque fois, ses enfants étaient renvoyés de leur établissement
scolaire à cause de retard de paiement des frais scolaires. Son commerce de cassave qui
soutenait la famille avant l’ouragan, ne générait plus grand-chose. Elle utilisait des outils
rudimentaires pour transformer les quelques paniers de manioc pour la production de farine de cassave. Quant à la cuisson, elle disposait de trois grosses pierres et de bois pour
chauffer sa platine, à l’air libre, juste à quelques mètres de sa maison, protégée par une bâche
qui a subi l’usure du temps. Une situation lui causait bien des problèmes de santé l’empêchant
d’augmenter sa production à cause la fumée des bois.

Benitha, une productrice de cassave dans la commune des Roseaux
Benitha, une productrice de cassave dans la commune des Roseaux
ActionAid Haiti

Après son adhésion au programme de mutuel, Bénitha a pu renforcer et relancer son
commerce, avec des fonds pour acheter de nouveaux outils et plus de produits. Il lui a fallu
beaucoup de travail, car elle devait trouver de nouveaux clients qui pourraient apprécier son
savoir-faire. Actuellement, Bénitha fait maintenant partie de la Cassaverie de l’Association
des Producteurs pour le Développement des Roseaux, un groupement qui a reçu un support
technique et financier du projet pour maximiser ses revenus et conquérir d’autres marchés au
niveau régional et national. Nous l’avons donc retrouvés derrières les fours récemment acquis
dans la cassaverie. Aujourd’hui Benitha produit non seulement en plus grande quantité ses
propres cassaves mais elle est également employée de la cassaverie grâce à ses compétences. Une situation qui a complètement changé la vie de cette mère sa famille. « En tant que mère de famille, j’ai maintenant plus d’activités m’occuper de mes enfants. Ils ne ratent plus de jours de classe et j’arrive à maintenir une équilibre dans le foyer car je participe dans les dépenses» nous a-t-elle fait savoir avec un large sourire, contente de ne plus avoir à faire la transformation de la farine de manioc manuellement. Bénitha s’est organisée pour multiplier ses gains et a même réparé sa cuisine, un espace qui lui tient à cœur – car c’est là qu’elle avait démarré son petit commerce. « Avant je ne pouvais acheter que quelques paniers de manioc. Aujourd’hui, je peux m’acheter une récolte entière. J’ai investi 12,000 gourdes dans du bétail et deux lopins de terre pour cultiver du manioc. Je mets de l’argent à côté pour mes enfants».

Erèse, une cheffe de famille avec une capacité d’adaptation hors norme

Erèse vient aussi de Fond Bayard, elle est la cheffe de famille et s’occupe seule de ses huit
enfants. Cultivatrice et commerçante, Erèse se distingue aussi bien par sa joie de vivre que par sa débrouillardise pour faire fructifier la subvention qu’elle avait reçue dans le cadre du projet ASARANGA. Selon la saison, Erèse produit l’huile de palma christi, le sirop de canne-à-
sucre, vend des produits alimentaires ou des articles de décoration de maison. En peu de
temps, ses bénéfices lui ont permis de rénover sa maison, payer d’un seul coup les frais
scolaires de l’un de ses enfants qui vit à Port-au-Prince et continuer à diversifier ses sources
de revenus. « Tout ce que j’ai réalisé avec ce que j’ai reçu, je l’ai fait par moi-même; sans l’aide d’un mari ou de personne. J’achète moi-même la canne-à-sucre, je paie pour le moulin
et supervise tout le processus de transformation jusqu’à la vente », nous a dit fièrement Erèse.

Erèse, une cheffe de famille avec une capacité d’adaptation hors norme
Erèse, une cheffe de famille avec une capacité d’adaptation hors norme
ActionAid Haiti

Malheureusement, le tremblement de terre du mois d’août 2021 à Jérémie a porté un coup dur
à Erèse. Tous les cabris qu’elle avait achetés avec une partie de ses bénéfices ont été tués dans des glissements de terrain. Une perte considérable qui n’a pourtant pas découragé Erèse qui s’apprêtait à se rendre au moulin pour une nouvelle production de sirop de canne lorsque nous l’avons rencontrée. « Je vais produire quatre barils de sirop de canne-a-sucre. Après la vente de ces quatre barils, j’achèterai tout de suite une autre pièce de jardin. En tant que mère
célibataire, toutes ces activités me permettent de répondre aux besoins de ma famille et de
préparer ma vieillesse ».


Fanette, maman et commerçante, une modèle de persévérance


Avec le volet nutritionnel, le projet ASARANGA a permis le dépistage de 514 enfants
malnutrition sévère dont 114 cas à risque dans la commune des Roseaux. Fanette faisait partie des jeunes mères qui n’arrivaient pas à joindre les deux bouts pour nourrir leurs bébés. Son fils de deux ans souffrait de la malnutrition aiguë. Elle ne savait pas comment trouver d’autres alternatives pour prendre soin de l’enfant à peu de frais. Une fois admise dans
le programme d’appui, elle avait non seulement reçu une subvention pour mettre sur pied un petit commerce mais elle a bénéficié également d’une formation sur la nutrition, basée sur les produits nutritifs qu’elle peut facilement trouver dans son jardin. Fanette possède maintenant quatre cabris et attend d’autres, grâce à une chèvre qu’elle a reçue dans le cadre du projet. « Je suis vraiment reconnaissante de l’aide que j’avais reçue avec ASARANGA. A présent, je reprends mes activités de madan sara. La chèvre que j’avais reçue m’a donnée trois autres. Bientôt, mon bétail va s’agrandir si la mise-bas de mes deux chèvres se fait sans problème ». La jeune mère parvient à s’occuper de ses enfants tout en faisant marcher son petit commerce de détaillant et s’adonner à l’élevage. « Les gens dans le voisinage se moquaient de mon fils car il était très chétif. J’avais honte de me promener avec lui, mais Dieu merci, j’ai intégré un
club de mamans dans le cadre du projet ASARANGA. J’ai appris beaucoup sur l’importance
d’une bonne alimentation et comment équilibrer la nourriture pour mes enfants», nous a
confié Fanette. Ces clubs, destinées aux femmes enceintes et allaitantes, ont été mis sur pied
dans la perspective de provoquer des changements sur les habitudes alimentaires et la
réduction de la prévalence de la malnutrition au niveau des différentes communautés
d’intervention.

Fanette, maman et commerçante, un modèle de persévérance
Fanette, maman et commerçante, un modèle de persévérance
ActionAid Haiti

116 061 bénéficiaires incluant 55 017 femmes et 61 044 hommes ont été subventionnées pour renforcer leurs activités économiques. La réalisation des activités de chaque composante a permis de renforcer la capacité socio-économique de ces ménages, diversifier la nutrition familiale et relever leur niveau de vie par des revenus de sources diversifiées. Le projet ASARANGA s’est aligné aux objectifs fixés par ActionAid Haïti pour renforcer la résilience et les capacités des populations tout en continuant à répondre aux urgences et à apporté des améliorations significatives dans la qualité de vie des communautés vulnérables dans les milieux ruraux, particulièrement des femmes. Depuis 1997, ActionAid Haïti travaille conjointement avec des partenaires locaux pour contribuer à l’élimination de la pauvreté dans les milieux ruraux en Haïti.