Grand’Anse : un projet redonne espoir aux familles déplacées
Depuis plusieurs années, la violence des gangs force des milliers de familles haïtiennes à quitter leur foyer. En Haïti, 1 287 593 personnes (soit 11% de la population) sont déplacées internes (PDI), ce qui équivaut à 290 631 ménages. Plus de la moitié des PDI sont des femmes et des enfants, et la majorité vit en familles d’accueil ou hors site. Dans la Grand’Anse, 22 218 ménages, soit 112 025 PDI, ont trouvé refuge dans des communautés locales. Tous vivent hors site officiel, ce qui rend leur situation particulièrement vulnérable et renforce le besoin d’un soutien rapide et concret.
Une réponse immédiate et durable
Depuis mars 2025, le projet « Sipò pou chanje lavi » accompagne 300 ménages à travers des distributions de cash (e-money), de semences, de caprins et d’outils agricoles dans les zones de Gommiers, Grand Vincent, Fond Rouge d’Ayer et Haute Voldrogue. Les cultures à cycle court (épinard, gombo, maïs, patate et manioc) assurent un impact rapide sur la sécurité alimentaire. Parallèlement, des formations en agroécologie ont été dispensées, permettant aux familles de créer leurs jardins familiaux et de relancer leur activité agricole malgré les conditions difficiles. Pour les participant·e·s, ce projet est arrivé à un moment crucial, leur offrant les moyens nécessaires pour reprendre leurs activités et retrouver confiance.
« Depuis que j’ai dû revenir ici, j’ai repris l’agriculture avec ma machette. Grâce au projet, j’ai appris de nouvelles techniques et j’ai retrouvé confiance en mes capacités », témoigne Michel*, un bénéficiaire d’une cinquantaine d’années.
De son côté, Dieunyse*, originaire de Carrefour-Feuilles, confie avoir quitté Port-au-Prince avec sa famille sans rien emporter. « Le projet m’a redonné espoir dès le premier jour. Je me sens renaître », raconte-t-elle avec émotion.
(*Nom d’emprunt pour protéger l’identité des bénéficiaires.)
Au-delà de ces témoignages, la distribution de cash permet aux familles de répondre à leurs besoins immédiats tels que l’alimentation, la santé ou la scolarité des enfants. L’appui en semences adaptées à cycle court, en outils agricoles et en caprins favorise par ailleurs le développement de leur résilience face au changement climatique, tout en générant des revenus qui leur permettent de prendre soin de leur famille au-delà de la durée du projet.
Un pont entre humanitaire développement et paix
Le projet « Sipò pou chanje lavi » allie aide humanitaire et initiatives de développement. Il améliore directement la vie des familles déplacées et des communautés hôtes tout en promouvant le respect des droits humains, notamment le droit à l’alimentation et le droit des femmes. Ces actions s’inscrivent dans la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD).
Ce projet est mis en œuvre dans une zone où APS/AAH et ses partenaires développent déjà des initiatives de développement. Cette articulation place notre travail au carrefour de la vision triple Nexus (humanitaire, développement et paix). Elle permet d’éviter que les ménages bénéficiaires du projet de développement, qui accueillent des familles déplacées, ne régressent en raison de la charge supplémentaire que représente l’accueil, tout en renforçant la solidarité, la cohésion sociale et la résilience communautaire.
Au-delà de l’aide matérielle, le projet organise des ateliers de médiation pour prévenir les conflits et encourager le dialogue communautaire. Les leaders locaux, religieux et représentants de l’OPC participent à ces sessions. Des micro-projets et des activités génératrices de revenus ciblant notamment les femmes victimes de violences basées sur le genre contribuent à une autonomie durable et à l’inclusion sociale.
Semer l’espoir et la résilience
En apportant un soutien concret aux familles déplacées de la Grand’Anse, le projet ne se limite pas à répondre à des besoins immédiats. En renforçant l’agriculture locale, la cohésion sociale et l’autonomie économique, le projet « Sipò pou chanje lavi » offre un tremplin vers un avenir plus stable et porteur d’espoir pour les communautés touchées.